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L'Étrange Bibliothèque de Haruki Murakami



Auteur : Haruki Murakami

Titre VO : Fushigi Na Toshokan

Traduction : Hélène Morita

Illustrations : Kat Menschik

Genre : nouvelle, fantastique


Éditions : 10/18

Publication : 3 novembre 2016

Pages : 80 pages


Prix : 8,40€


Résumé

Japon, de nos jours.

Un jeune garçon se rend à la bibliothèque municipale. Jusqu'ici, rien que de très banal, le garçon est scrupuleux, il rend toujours ses livres à l'heure. Cette fois, pourtant, c'est d'abord l'employée qui l'envoie dans une salle qu'il ne connaissait pas. C'est un vieil homme, ensuite, qui le mène par les méandres d'un labyrinthe dans ce qui semble bien être une prison. C'est un homme-mouton qui l'y attend, qui aimerait bien l'aider mais qui redoute le pouvoir du gardien des livres. Enfin, c'est une frêle jeune fille muette qui va l'aider à se libérer de cette bien étrange bibliothèque...


Avis lecture

Haruki Murakami est l’un des auteurs japonais les plus connus en France, si ce n’est le plus connu. Il était donc grand temps que je me lance à la découverte de cette plume si réputée. Et pourquoi ne pas commencer pour l’occasion par une immersion dans sa dernière œuvre publiée en France : L’Étrange Bibliothèque ?


Ce texte relativement court tient davantage de la nouvelle fantastique que du roman. Ce que j’aime dans la littérature japonaise, c’est ce style à la fois épuré et profond, toujours empreint de notes poétiques, qui entraîne le lecteur dans une bulle, quittée à regret. L’Étrange Bibliothèque ne fait pas exception.


Cette nouvelle nous mène aux côtés d’un jeune garçon dont nous ignorons jusqu’au nom et qui se rend à la bibliothèque municipale pour emprunter des lectures relativement atypiques. Passionné et curieux de tout, l’adolescent, du moins peut-on en déduire un âge assez jeune, s’est pris une nouvelle lubie : en apprendre plus sur la collecte des taxes dans l’Empire ottoman. La bibliothécaire lui indique alors dans un lieu déterminant pour la suite : la salle n°107.

Traversant des couloirs et des couloirs pour trouver l’objet de ses recherches, le jeune homme fait alors une rencontre étrange : celle d’un vieillard, autour duquel ne cessent de tourbillonner d’énormes mouches. Ce à quoi le garçon ne s’attendait pas, c’est d’être enfermé dans une cellule par ce vieillard, dans l’attente de l’apprentissage des deux ouvrages empruntés sur le recouvrement des taxes dans l’Empire ottoman. Et dans quel terrible but ! C’est alors le début d’une immersion dans un monde étrange et fantastique, reclus et isolé, aussi angoissant que curieux. D’où viennent cette étrange petite fille muette et ce drôle de monsieur mouton ?

J’ai été marquée dès le départ par la passivité du héros. Très intelligent, il se pose de nombreuses questions, souvent pertinentes, et alors même qu’il voit le piège se refermer sur lui, ne fait absolument rien pour l’en empêcher. Faut-il y voir une sorte de message caché, un message subliminal sur les têtes pensantes au sein de la société ? J’avoue avoir eu beaucoup de mal à saisir où l’auteur souhaitait en venir. La confrontation entre le réel et le fantastique est ici permanente et il est difficile de dire ce qui relève de la réalité ou de l’esprit du jeune garçon. Il est impossible, en effet, de ne pas s’interroger sur sa santé mentale. Personnellement, je ne pense pas que le jeune garçon soit frappé de folie, bien au contraire. Il est particulièrement lucide et s’il y a un fou ici, c’est bien le vieillard despote. Mais d’une folie dangereuse, effrayante où l’homme apparaît paradoxalement lucide, mettant ses capacités au service de sa propre folie. J’ai préféré y voir la métaphore d’une élite dirigeante et despotique qui s’accapare les qualités et les savoirs des êtres les plus doués à leurs propres desseins. Il appartient alors à l’individu seul de faire un choix : rester passif ou lutter. Mais gare à ne pas se réveiller trop tard ! Sans compter qu’il peut s’avérer parfois plus pertinent pour la réussite de son entreprise de ne pas agir seul. L’union fait la force dit-on.


Sur la fin, que dire si ce n’est qu’elle m’a laissée complètement perplexe ? Tout y est en parfait décalage avec le reste de la nouvelle, à commencer par le ton. Je ne suis pas sûre, là non plus, d’avoir tout saisi…


Enfin, quelques mots sur les très belles illustrations de cet ouvrage. Si le prix peut paraître relativement élevé pour une simple nouvelle, la qualité y est largement. Toutes les pages sont en papier glacé et les illustrations nombreuses et en couleurs. Elles contribuent largement à se plonger dans l’ambiance, renforçant même l’impression d’étrangeté régnante.

Conclusion

Si j’ai apprécié cette lecture fort déconcertante, je ne peux m’empêcher de penser que je passe à côté de quelque chose. En toute honnêteté, je ne pense pas disposer du bagage intellectuel et culturel nécessaire à la pleine compréhension de cette courte œuvre et mon analyse peut se révéler très certainement inexacte. Cependant, il s’agit là, bien entendu, que de mon ressenti.



Extrait

« La fillette posa doucement un doigt sur sa bouche délicate. Je me tus à l'instant.

"L'homme-mouton a son monde d'hommes-moutons. Moi, j'ai mon monde. Et toi, le tien. N'est-ce pas ?

- Oui, sans doute.

- On pourrait dire aussi que même si je n'ai pas d'existence dans le monde de l'homme-mouton, cela ne signifie pas que je n'ai aucune existence.

- En somme..., commençai-je. Tous ces mondes différents se retrouvent mêlés ici. Ton monde, le mien, celui de l'homme-mouton. Parfois ils se chevauchent. Et parfois, non. C'est ce que tu veux dire ?" »

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